« Koromak », (qui veut dire le grand en sérère), c’est son prénom et Faye, son nom de famille. Ce Sérère de souche est bien connu des Sénégalais, car ses révélations aux lendemains des cérémonies de Xoy, résultat d’un travail d’équipe, alimentent les débats dans tous les espaces à palabres.
Mais ce qui fait plus le charme de cet homme dépositaire d’une tradition très ancienne, c’est que son discours aussi célèbre que celui des hommes politiques d’aujourd’hui, ou autres chefs religieux, n’est pas écouté avec « les mêmes oreilles ». Eh oui ! Son propos révèle, à quelques détails près, le nombre de gouttes d’eau qui tomberont dans le champ d’arachides d’un Diégane Faye au cœur du Sine (région naturelle de Fatick), le nombre de grains de mil que récoltera Mapaté, le cultivateur de Nioro du Rip, « l’attentat suicide » que les criquets pèlerins préparent depuis le Fouta, ou encore le nombre de « comateux » que l’on dénombrera à l’issue d’un combat de lutte Balla Gaye II vs Modou Lo…
Tributaire de cette tradition qui a encore sa place dans l’équilibre et la régulation de la société (à consommer avec modération), « Koromak » est loin de raconter des chinoiseries, ou tout simplement des sénégalaiseries, car après tout, à l’image du Toubab qui se passionne à consulter son horoscope au quotidien, au pays de la téranga, « on aime vivre le futur, à l’avance … ».
Ce qui n’empêche pas l’autre « Koromak » d’inviter à vivre un passé qui date de l’époque des Indépendances. Celui-là est un navire, et pas n’importe lequel. Tout aussi imposant que son nom, ce « Koromak » version bateau, avait fait sa star parce qu’il était le premier chalutier multipêche construit au Sénégal. La cérémonie de mise à l’eau fut à la hauteur de l’événement devant un parterre d’invités et de hautes personnalités. « J’ai tenu à présider cette cérémonie et ma femme a tenu à être la marraine du Koromak pour marquer l’intérêt que le gouvernement sénégalais porte à la production industrielle… », avait déclaré le président Léopold Sédar Senghor cette après-midi du mercredi 23 janvier 1963 à Bel Air, selon les vieilles pages dorées de Dakar Matin (quotidien de cette époque).
Le « Koromak » était long de 17 m, sa jauge de 65 tonneaux et le volume de sa cale à poissons de 28 m3 ; ce qui faisait de ce navire le plus important en matière de bâtiment de pêche réalisé sur la côte d’Afrique noire par les ateliers et chantiers maritimes de Bel Air et le Groupement artisanal sénégalais des charpentiers de Marine (Bokk Diom). N’est-ce pas là une histoire de grandeur ? Ce « Koromak » qui était investi aussi d’une mission a bravé la grande bleue et porté son message à sa façon… Même si un « Koromak » en cachait un autre !
Cinquantenairement vôtre !!!
Du Monument de l’Indépendance…