Pourquoi le choix du nom ABC ?
En tant qu’initiales de l’alphabet, ABC sonne comme un recommencement. Quels que soient la culture, la couleur de la peau, la race, le vécu, ces 3 lettres sont comprises de manière universelle.
ABC a commencé en 2011 par une page Facebook. La page qui parlait de foulards, à ses débuts, est devenue de fil en aiguille une plateforme pour m’exprimer. A cette époque, je revenais du Nigeria, après quelques mois entre Lagos et Surulere. Je décidais d’adopter l’Imprimé Africain : le Wax. Des foulards, je commençais donc à valoriser les tenues que je portais et que je dessinais moi-même avec une touche de Wax et ce foulard qui ne me quitte jamais.
Au départ, l’idée était d’appeler la marque African Beautiful Culture, mais comme mon ancien collaborateur, à l’époque, Dominique Mbengue, avait lancé « Boul Comprendre », nous avons appelé la marque Aduuna Bul Comprendre (On ne comprend pas toujours la vie), qui devint ABC lorsque nos chemins se sont séparés.
Beaucoup trouvent que mes tenues sont trop pudiques. En réalité, c’est parce que j’aime cette Afrique qui impose qu’on la découvre.
Racontez-nous les débuts de cette aventure dans le stylisme ?
J’ai toujours aimé créer et faire du dessin. Déjà à 13 ans, j’avais gagné un concours au Village des Arts pour des portraits. Mais je ne suis pas styliste. Je ne suis pas professionnelle non plus. Je me définis plutôt comme une grande passionnée de la mode africaine. J’aime porter le foulard pour affirmer aussi cette identité. J’ai toujours été à la recherche du vécu de toute chose, je suis particulièrement attirée par la culture, et tout ce qui touche à l’Histoire me passionne. Saviez-vous par exemple que pendant la colonisation, la manière pour la femme, de nouer le foulard, permettait de communiquer avec le mari, en période d’esclavage… Donc cela va au-delà, juste de porter une tenue.
Beaucoup trouvent que mes tenues sont trop pudiques. En réalité, c’est parce que j’aime cette Afrique qui impose qu’on la découvre.
J’ai donc décidé d’apprendre le métier de styliste, en sus de celui que j’exerce en tant que Responsable Marketing au sein d’une entreprise de technologie, parce que j’aime bien faire les choses moi-même. J’avoue que c’est parfois un gros défaut.
Je tiens particulièrement à rendre hommage à celle qui, selon moi, a été de tout temps ma source d’inspiration : Collé Ardo Sow. Nous nous sommes rencontrées à plusieurs reprises et à chaque fois, je découvrais en elle un modèle pour les générations futures à travers l’allure et la pudeur qu’elle reflète et que j’essaie de faire ressortir dans nos tenues.
Quand vous créez, quel message voulez-vous passer à travers vos tenues ?
Notre slogan, c’est « LOVE AFRICA. WEAR AFRICA. ».Nous croyons en une Afrique qui s’épanouit culturellement et qui s’assume avec sa diversité. En aimant l’Afrique et en « portant l’Afrique » au sens propre comme figuré, nous pensons que la mode peut être un levier de développement certain pour ce continent. Nous prenons des tissus du Mali pour en faire des coupes européennes, des tissus qui nous viennent de l’Asie pour en faire des coupes Africaines, pour rappeler justement le sens du partage et de l’universalité mentionnés plus haut avec le sigle ABC. Mais la particularité de notre marque, réside dans le fait que nous accompagnons les prisons du Sénégal. Notre modèle économique est de partager 1/3 de nos marges avec les prisons grâce à une ONG qui se nomme CIBITI.
Pour la petite histoire, mon défunt père était le directeur de l’Ecole nationale de police, et pendant son cursus, il ne cessait d’intégrer à la maison des ex-prisonniers pour leur donner une seconde chance. Et comme à mes 13 ans, je lui avais promis de fonder « un empire en son nom », lorsqu’en 2011, j’ai créé « Desi’GNING », la structure commerciale qui porte ABC, je me voyais quelque part lui rendre hommage. Et à chaque fois que nos marges aident à financer un projet en prison, je me dis qu’il est parmi nous, et que son œuvre se poursuit malgré le fait qu’il nous ait quittés en 2002.
Qui est derrière cette marque ? Parlez-nous de vous ?
C’est très délicat de parler de soi. En wolof, on dit « sabu du fott boppam* » !
Je suis Ndeye Absa Gningue, serial entrepreneur qui évolue dans le monde du Marketing et de la Vente depuis une dizaine d’années. J’ai travaillé pour des marques telles que Procter & Gamble (P&G), Samsung Electronics, avant de monter ma propre entreprise, dix ans après la promesse faite à mon père à mes 13 ans, de créer une structure à son nom, qui s’appelle DESI’GNING. Je suis actuellement responsable Marketing chez IBM depuis 4 ans.
Quelles sont les dates ou événements marquants d’ABC ?
2012 – Alors que la marque n’est encore qu’un concept, pour la plupart composé de mes tenues personnelles, ABC est choisi parmi les 10 projets de la compétition Orange Social Entrepreneurship.
2014 - ABC participe à la compétition « e-commerce PRESTASHOP » et est short-listé comme demi-finaliste. Les premiers PBPs sont lancés, et les premiers investissements sont réalisés.
J’ai également eu cette année-là, l’honneur de participer au Young African Leadership Initiative sur invitation du Président Barack Obama. Nous faisions partie des 500 jeunes choisis pour représenter le Leadership en Afrique, une expérience inédite tant sur le plan personnel que professionnel. A l’époque, ABC est d’ailleurs choisi comme étude de cas dans le cadre du Young Africa Leadership Initiative par la télévision américaine Voice of America.
2015 – ABC est à nouveau pris comme étude de cas par la télévision américaine Voice Of America, avec une équipe qui s’était déplacé au Sénégal pour partager à nouveau l’impact du projet.
2016 - ABC devient la première organisation privée à mettre en place un micro-jardin au Fort B (Maison d’Arrêt et de Correction pour les plus jeunes détenus). La marque est également choisie comme étude de cas par l’USAID, pour le 8 Mars 2016, en marge de la célébration des Femmes. La même année, nous participons à nouveau au concours Orange Entrepreneuriat Social, mais cette fois, en tant qu’entreprise, pas en tant que projet. Nous sommes short listés pour la finale et bénéficions d’un programme de mentorat pendant une année avec GROW MOVEMENT avec la remarquable Dr Karin Stumpf, comme coach, qui a plus d’un égard nous a aidé à donner une plus claire vision de la marque.
On s’est dit, pourquoi à l’ère des Objets connectés, on ne créerait pas un Parapluie connecté ?
Vous nous présentez des parapluies en wax, dites nous en plus ?
C’est de ces échanges réguliers avec Karin, que nous avons commencé à nous démarquer, et à chercher à nous différencier dans un marché ou le Wax est de plus en plus visible, comparé à nos débuts. Nous avons choisi l’innovation pour nous positionner au-delà de « l’habillement africain », vers une réinvention de la marque - ABC 2.0 !
Les parapluies en wax, sont nés du fait que j’ai des parapluies assez flashy à la maison, qui ne collent pas forcément avec les tenues colorées que j’ai dans ma garde-robe. Je me suis dit, pourquoi ne pas en faire un, qui soit assorti à mes chaussures, à mon foulard ou à mes colliers généralement artisanaux ? Eureka.
Et bien sûr derrière ces parapluies, il y a une histoire. J’ai rencontré celui qui les conçoit à Tambacounda. Il était de Diourbel et nous avons décidé de travailler ensemble car je trouve que Diourbel est le berceau de la mode sénégalaise. C’est mon opinion personnelle mais que cela soit les pagnes de « Ndiareem », le « faaru Mbaam », le fameux chapeau porté par Amilcar Cabral qui est si réputé, le « njaxass » et la culture Bayfall, le fameux « Baye Lahad », la lingerie sénégalaise en elle-même a ses sources à Touba. La plupart des nuisettes tricotées que l’on retrouve à HLM viennent de là-bas… Bref, entre deux créateurs un peu fous, le courant est vite passé.
Il a 38 ans et n’a fait que 4 ans à l’école et, pourtant tout le processus suivi pour faire ces parapluies, pour moi méritait d’être appris dans nos lycées. L’apprentissage. ABC… encore ! J’ai donc décidé de proposer cette activité dans les cours de Mathématiques. Cela se fera sûrement à la rentrée in sha Allah.
Et puis pour nous différencier, la Geek que je suis, s’est dite, mais pourquoi ne pas connecter le parapluie ? Combien de fois sommes-nous sortis avec un parapluie alors qu’il ne pleuvait pas ? Combien de fois avons-nous oublié de le prendre un jour de pluie. On s’est dit, pourquoi à l’ère des Objets connectés, on ne créerait pas un Parapluie connecté ?
Quels sont les projets de la marque ?
Aujourd’hui, nous comptons vraiment nous lancer sur l’inclusion de la technologie dans l’habillement. Je travaille pour IBM, qui a lancé la première robe connectée avec Watson. Nous avons créé en 2017, les premières claquettes sénégalaises appelées « Njaxass ». Du patchwork sur des chaussures, c’est assez particulier. Imaginez que ces claquettes soient à même de compter le nombre de kilomètres de marche que vous avez faits depuis que vous les portez ?
Nous avons également aussi cette année, créé une ceinture-gaine. Qui ne fait pas juste office de ceinture, mais vous serre la taille pour un effet « ventre plat » ! Imaginez que cette ceinture vous donne le nombre de calories brûlés par jour, où vous donne votre tension artérielle ?
Toutes ces créations sont nées d’un vécu, d’expériences personnelles, tout comme ABC est né d’une expérience difficile vécue, mais qui aujourd’hui aide des détenus à garder espoir vis-à-vis d’une société qui ne les regarde pas d’un œil inquisiteur, parce que Aduuna Bul Comprendre !
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18 janvier 2018 à 17:07, par jallet viviane
Magnifique
Bravo pour votre talent
13 août 2018 à 10:07, par ABC-Aduuna Bul Comprendre
Merci beaucoup Viviane !
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