Le « Bukut » de Diakéne Wolof, 50 ans après

Le village de Diakéne Wolof situé dans la commune d’Oukout, dans le département d’Oussouye a organisé la cérémonie traditionnelle d’initiation en pays Diola plus connue sous le nom de « Bukut   ». Une première de son histoire depuis plus de 50 années. Le village de Diakéne Wolof est désormais entré dans l’histoire de la culture Diola.

Publié le 18 août 2022  

Ils étaient plus d’une centaine de jeunes gens à inscrire leurs noms dans l’histoire. Cela pour les besoins de la cérémonie du « Bukut   », un événement que les populations de Diakéne Wolof, village situé en basse Casamance, attendaient depuis plus de 50 ans. Il vise a bien les préparer afin qu’ils deviennent plus tard, des adultes responsables et engagés dans leur communauté, la société, mais aussi à les ancrer davantage dans leur culture d’origine.

Constitué de migrants venus du reste du Sénégal, Diakéne Wolof ne sacrifiait pas au « Bukut ». Cette année, le village a vécu au rythme de cette cérémonie traditionnelle. Des coups de fusil aux danses initiatiques diola, rien n’a été laissé en rade par les populations pour démontrer la vitalité et la richesse de la culture « diola » en pareille occasion.

Un vieux qui manie son arme à feux pour la cérémonie

C’EST QUOI LE BUKUT ?

Définir le Bukut revient à le présenter sous sa forme, tout en sachant que son fond (dans les détails), reste un mystère pour les non initiés et un secret pour les initiés. Ce préalable établi, on peut présenter le Bukut comme une initiation à travers laquelle le jeune diola (futur-initié) est soumis à une série d’épreuves à la fois physiques et artistiques, instructives et spirituelles. Sur ce sujet, l’animateur culturel Oumar Badiane disait que le Bukut est « une cérémonie d’initiation… une étape qui vise à intégrer le jeune Diola dans sa communauté ». De cette façon, le « Bukut » assure la reproduction de cette société par la transmission des valeurs principales auxquelles se réfèrent tous ses membres. L’un des objectifs majeurs de l’initiation consiste en l’établissement d’un cercle de solidarité durablement ancré sur des symboles et des valeurs cosmogoniques fièrement partagés dans la ferveur culturelle et l’engouement de toutes les composantes sociales de la collectivité.

« L’initiation enchaîne », dit-il « définitivement et complètement l’individu au groupe initiatique, fait de lui un homme à part entière, reflet obéissant et fidèle de la communauté". Pour le jeune initié, ce temps de formation constitue son entrée dans la société adulte, son installation dans le processus de maturité. C’est son introduction dans la vie du code, du décodage, du mystère, de l’évidence non évidente, de la logique complexe. Cette initiation collective est au fondement d’une société égalitaire où la structure des relations entre les individus, selon leurs fonctions et leurs statuts, ne s’appréhendent pas aisément. La société diola a toujours été présentée comme égalitaire, non hiérarchisée, sans castes. Ainsi, cette initiation, loin d’être contradictoire avec une éducation moderne, peut contribuer à consolider les fondements des systèmes d’éducation.

BALINGHORE LE PARI DE LA MOBILISATION

Le samedi 13 Août dernier, le village de Balinghore, situé dans la commune de Bignona a également initié au bois sacré une génération de jeunes garçons venue de tous les horizons. Ils sont rentrés dans le « bois » accompagnés par les sages du village pour les guider et leur inculquer des valeurs qui semblent perdues de nos jours comme le « diom » (courage) le « kersa » (retenue), le « ngor » (dignité). Ces jeunes sont venus de l’Europe, de l’Amérique, de l’Asie, de la sous-région et même de l’intérieur du pays pour assister à ce grand rendez-vous traditionnel, passage obligatoire chez les diolas.

Futurs initiés

UN ÉVÉNEMENT À LA FOIS FESTIF ET MYSTIQUE

L’approche de la cérémonie est marquée par le rasage des têtes. Ce sont les oncles qui se chargent de la tâche. Cette année, ils étaient des centaines à subir l’épreuve tellement que l’attente était longue. Le « Bukut » c’est aussi une occasion pour le diola de montrer la richesse de sa culture. Les futurs initiés retirent leurs vêtements habituels pour enfiler une tenue traditionnelle recouverte d’un perlage qui orne le cou, la tête et les chevilles. Les futurs initiés « Mbath » ou « Ambacc » sont munis d’un instrument de musique traditionnelle qui permet de rythmer une danse à tout moment. Un « Mbath » doit être un bon danseur et ses ainés déjà initiés peuvent l’inviter ou l’imposer à danser autant de fois qu’ils le souhaitent.

Danse des « Mbath »

Avant l’entrée dans le bois sacré, drapés de leurs tenues traditionnelles, les femmes et les sages du village accompagnent au rythme des pas de danse, les « Ambacc » (futurs initiés) jusqu’au seuil du bois sacré pour les remettre au génie protecteur des lieux et aux sages de la contrée. Des centaines de bœufs sont immolées un peu partout dans les villages pour faire plaisir aux hôtes. L’évènement s’accompagne de diverses démonstrations de bravoure : gris-gris sur le coup et autour de la taille se tranchant la langue sans goutte de sang. Ils célèbrent en rivalisant des pouvoir mystique. Il s’agit d’illustrer aux yeux de tout le monde son pouvoir mystique et sa virilité. Un spectacle sans commun mesure.

Coupe-coupe qui dominent le rituel

Les jeunes séjourneront dans le bois sacré plusieurs semaines. Avant d’en sortir, ils prêtent le serment de mourir avec ce secret.

BUKUT BALINGHORE 2022

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