La décision de stopper les chantiers sur le site de l’ancien aéroport Léopold Sédar Senghor de Dakar n’est pas sans conséquences. L’intense activité économique qui dépendait de ces chantiers est depuis en berne. Mais du côté des habitants, c’est un grand ouf de soulagement et espèrent que l’État du Sénégal va prendre des mesures afin que les terres « spoliées » soient retournées aux ayants droit.
Sur le site de l’aéroport, les camions, calèches, pelleteuses, bétonnières et autres machines, qui faisaient la loi, n’ont plus voix au chapitre. Maçons, menuisiers, ferrailleurs, qui gagnaient leur pain dans les chantiers, ont disparu comme par enchantement. Ce dépeuplement a eu des conséquences sur les restaurants de fortune qui profitaient de la forte activité pour faire de bonnes affaires. Les clients disparus, ils ont fini par mettre la clé sous le paillasson. Un silence de cimetière règne désormais sur les lieux où les bruits des machines, mêlés aux cris des ouvriers, provoquant une atmosphère assourdissante. Terminées les activités économiques qui permettaient à des pères et mères de famille de joindre les deux bouts et de subvenir aux besoins des leurs.
Un calme plat s’est installé sur les lieux. Seuls les bruits des décollages et des atterrissages des avions déchirent parfois le silence.
Les immeubles inachevés dressent leurs murs de béton. Sur les façades, des inscriptions de la Direction générale de la surveillance et du contrôle de l’occupation des sols (DESCOS) ordonnant l’arrêt des travaux.
Le désespoir des ouvriers
Si les ouvriers se sont volatilisés, des agents de sécurité assurent le gardiennage des lieux. Mais, au chômage depuis un bon bout de temps, les ouvriers dans le désarroi, reviennent parfois à la recherche d’une hypothétique opportunité de travail.
Djily, maçon, revient de temps en temps pour voir si les activités n’ont pas redémarré. Mais, il ne trouve rien à se mettre sous la dent. « La situation est alarmante. Perdre son gagne-pain de la sorte est difficile pour un chef de famille avec des obligations », regrette-t-il.
Ainsi, les maçons, manœuvres, menuisiers, électriciens qui travaillaient ici indexent le gouvernement sur l’opportunité d’une telle décision qui plonge des soutiens de famille dans le dénuement.
Les populations crient victoire et réclament « leurs terres »
Si du côté des ouvriers, on broie du noir, le sourire est revenu sur les visages des populations de Yoff. Ces dernières ont longtemps dénoncé la boulimie foncière des autorités de l’ancien régime, accusées d’avoir accaparé les terres avoisinant l’aéroport de Dakar. Une véritable bombe à retardement qui mine depuis belle lurette la tranquillité de ce village lébou. Ce peuple de pêcheurs qui, jadis, détenait une grande partie des terres de Dakar, est dépossédé de son assiette foncière.
Alors où la démographie de Yoff est en perpétuelle augmentation, et les besoins en espaces se font pressant, la spéculation foncière plonge les populations dans le désarroi et elles exigent l’application du slogan « Jub – Jubbal – Jubantu », proné par le nouveau pouvoir, qui promeut la droiture et la rectitude.