Thiamassas vient de l’appellation sérère « Thièm a saass », les vaguelettes salées. Elle est aussi dénommée « A mbel ala na muc ala », la rivière de la grâce. Cette dénomination fait également référence aux « Sund ke Jegem », les guerriers de Djigème qui s’y réfugiaient pour se préparer au combat. À cette époque, Nianing, Mbour, Sandiara et Thiadiaye faisaient partie du royaume du Djigème.
D’après les récits des anciens, il ne fallait pas rester à la même place dans ce lieu car la terre se mouvait, mais quiconque le traversait était sauvé.
Nous aurions aimé vous parler de la datation de Thiamassas, mais celle-ci est controversée : elle est estimée à la période du néolithique par certains chercheurs, tandis que d’autres la date de la période du paléolithique supérieur. Des armes en silex datant d’environ 100 000 ans y auraient été découvertes.
Plus récemment, des fouilles archéologiques ont été effectuées par des étudiants de l’Université Cheikh Anta Diop, mais nous ne disposons pas d’éléments suffisants, les fouilles auraient été arrêtées faute de moyens. Mais le seul fait de les évoquer peut attirer l’attention sur l’importance du site et l’intérêt de le revaloriser pour le tourisme.
Une histoire de djinn et de pangol
Ainsi nous vous raconterons une autre histoire parmi tant d’autres, loin du regard scientifique, à partir des récits des anciens du village.
Selon ces derniers, le site de Thiamassas abritait un djinn ainsi qu’un fangool, singulier de pangool. Les djinns sont des créatures surnaturelles vivant dans la brousse ou à proximité des hommes, en général dans des arbres symboliques comme les grands baobabs et les grands tamarinier. Généralement ils sont invisibles, mais peuvent se rendre visibles en prenant différentes formes humaines, animales ou végétales. Il paraît qu’ils sont capables d’influencer les hommes, que ça soit mentalement ou physiquement.
Les pangool quand à eux sont, dans la religion sérère, considérés comme les saints et les esprits des ancêtres. Ils jouent le rôle d’intermédiaires entre le monde des vivants et Roog, le dieu sérère. Nous y reviendrons dans un autre article.
Comme chez les hommes, il y a des gentils et des méchants dans le monde des djinns et des pangool. Les anciens du village considèrent le djinn et le fangool de Thiamassas comme gentils, mais pouvant toutefois se mettre en colère quand les habitants dérogeaient aux règles.
Leur rôle était de veiller sur le village de Nianing afin qu’il soit prospère. Les récoltes étaient souvent abondantes, les femmes remplissaient des bassines entières de poissons et de fruits de mer qu’elles faisaient sécher pour vendre, les troupeaux de vaches étaient nombreux, les hôtels étaient remplis de touristes, les arrivées se succédaient. Bref, agriculteurs, pêcheurs, éleveurs, hôteliers, jeunes actifs, visiteurs... tout le monde trouvait son compte.
Des esprits qui retenaient les étrangers
Il se disait que quand un étranger venait à Nianing, il ne fallait pas qu’il indique quand il devait repartir, car il ne repartira pas ce jour là. « Yal Saahlé », l’esprit du village, le retenait, car il aimait les étrangers à tel point qu’il les faisait rester plus longtemps que prévu. Ainsi, certains ne sont jamais repartis et ont élu domicile à Nianing.
Des histoires de possession et de prospérité
Le commun des mortels ne peut pas voir ces esprits, seuls les « Yal Khohe », les personnes ayant des pouvoirs, peuvent les voir. Mais il arrivait qu’une simple personne les voit « accidentellement », cette personne devenait alors folle et perdait complètement la tête : il fallait vite agir par un rituel bien précis fait par des guérisseurs pour la débarrasser de ses visions.
D’après ces visions, on sait que les baobabs du site scintillaient de mille feux quand les esprits se déplaçaient pour certains, parce qu’ils cuisinaient pour d’autres. Ce n’était donc pas étonnant d’être au milieu de la brousse et de sentir l’odeur de la cuisine alors qu’il n’y a aucune maison aux alentours. Il n’était pas étonnant non plus de passer devant un baobab et d’entendre des battements de tam-tam et des applaudissements.
Des témoins ont révélé que le djinn de Thiamassas pouvait s’introduire dans la cuisine de l’hôtel du Club Aldiana et mettait la vaisselle sens dessus dessous quand il était en colère.
Des femmes ont raconté avoir été possédées par ces esprits. Elles tombaient en transe pendant les offices religieux dès que quelqu’un prononçait l’esprit de Thiamassas et s’en suivaient des séances d’exorcisme. Ça crie, ça cogne la tête, ça se tortille par terre, la possédée parle d’une voix méconnaissable, bref il faut le voir pour y croire. Toujours selon les témoins, ce phénomène a tellement pris de l’ampleur que les religieux ont sollicité le départ des esprits.
Certains disent aujourd’hui qu’ils sont partis, emportant avec eux la prospérité de Nianing. Selon les anciens, sans l’accord de « Yal Saahlé », l’esprit du village, toute tentative de réouverture des hôtels échouera.
16 janvier 2023 à 18:20, par Paulette
Philippe, vient vite témoigner l’expérience que tu vient de vivre
17 janvier 2023 à 09:39, par webmaster au-senegal.com
C’est vrai que les esprits retiennent les étrangers. J’ai fait l’erreur de dire quand je repartais, et je ne suis reparti que le lendemain. Il faut dire aussi que les gens de Nianing sont tellement accueillants...
Répondre